Thomas Brunet

Thomas Brunet naît probablement à Saint-Eustache le 7 avril 1805. Fils de Thomas Brunet et de Marie-Magdeleine Vaillancourt, il est baptisé en ce lieu dès le lendemain.

Brunet épouse d’abord en la cathédrale d’Ottawa Elmire (Olive) Richard le 25 août 1833. Il se marie ensuite avec Marie-Arthémise Cazal dit Girardeau à Saint-Eustache le 4 novembre 1845. Celle-ci est la fille d’Eustache Cazal dit Girardeau et de Cécile Éthier. Le couple a au moins douze enfants connus, tous nés entre 1847 et 1867 : à savoir Thomas, Appoline, Damase, Éléonore, Elmire, Eustache-Elzéar, J.-Eustache, Joseph, Lambert, Marie-Élisabeth, Marie-Zéphirine et Pierre.

Nous savons, par le biais de divers témoignages et recensements de l’époque, que Thomas Brunet réside sur la côte du Lac à Saint-Eustache. Le recensement de 1842 le qualifie toutefois de « voyageur ».

Thomas Brunet réalise une seule déposition relativement à son implication dans les événements de 1837 à Saint-Eustache. Réalisé le 24 février 1880 auprès du marchand William Henry Scott et du docteur Perreault (dont nous ignorons le prénom), ce témoignage est publié en 1883 dans le fameux ouvrage de Charles-Auguste-Maximilien Globensky, La Rébellion de 1837 à Saint-Eustache. Ce dernier décrit d’ailleurs le déclarant comme étant « possesseur d’un bel établissement agricole, et c’est un cultivateur aussi à l’aise que bien considéré dans Saint-Eustache. C’est en outre un homme d’un jugement rare et il est renommé par son esprit vif et naturel comme pour ses reparties promptes et fines ». Voici donc sa déclaration en intégralité :

Je, soussigné, Thomas Brunet, résidant dans le rang du Lac de la paroisse de Saint-Eustache, déclare que, en 1837, j’étais un loyal sujet de Sa Majesté et que j’eus à endurer bien des persécutions de la part des rebelles de l’époque. Aussi, je fus obligé comme beaucoup d’autres d’abandonner ma femme, mon enfant et ma demeure pour aller me réfugier dans la paroisse de Saint-Martin, voisine de la nôtre, qui était restée loyale et attachée au gouvernement.

Le jour de la bataille, une partie des loyaux qui s’étaient retirés dans la paroisse de Saint-Martin, et accompagnés d’un des messieurs Dumont, co-seigneur de la seigneurie des Mille-Îsles, qui, lui aussi, était loyal, se rendirent avec moi sur le bord sud de la rivière Jésus, c’est-à-dire en face du Grand-Moulin, d’où nous pûmes voir le résultat de la bataille du 14 de décembre.

Comme un grand nombre de rebelles fuyaient et s’orientaient sur le lieu que nous occupions, j’en vis un que je reconnus et avec lequel j’avais eu maille à partir avant la bataille, parce qu’il avait voulu me faire prisonnier et m’amener au camp du Dr Chénier. Étant encore sous l’effet momentané d’une colère légitime, produite par les mauvais traitements que lui et d’autres m’avaient fait endurer, je le fis prisonnier et le conduisis quelques moments après au village où je le livrai aux autorités militaires. Mais dès le lendemain, ce prisonnier, du nom de Alexandre Poirier, qui vit et réside encore dans Saint-Eustache, fut mis en liberté par le capitaine Globensky.

J’ai vu, le lendemain matin de la bataille, et avant le départ des troupes pour Saint-Benoît, le corps du Dr Chénier qui était exposé décemment sur le comptoir de l’hôtel Addison; et je dis que celui qui rapporte que « le corps du Dr Chénier aurait été mutilé, et que son cœur aurait été porté au bout d’une baïonnette » commet un mensonge ignoble car rien de tel n’est arrivé, et il faut que ce raconteur soit bien méchant ou bien innocent pour faire un récit aussi mensonger.

J’affirme aussi que j’ai toujours entendu dire que, aussitôt que le Dr Chénier fût sorti de l’église, il fut tué d’un coup de feu tiré sur lui lorsqu’il fuyait et voulait franchir le cimetière qui touchait à la dite église.

De plus, j’approuve la formation de la compagnie des volontaires du capitaine Globensky, et si j’avais pu m’y joindre, j’y aurais figuré en 1837, afin de mieux protéger ma femme comme tous les loyaux qui étaient pourchassés comme des bêtes fauves. Je n’ai que des louanges à décerner au capitaine Globensky pour les services qu’il a rendus en 1837, même aux insurgés; et je ne crois pas qu’il y ait ou qu’il puisse se trouver dans Saint-Eustache un seul individu impartial qui ne respecte point la mémoire de ce vieux gentilhomme militaire.

Cet Alexandre Poirier, dont il est question dans la précédente déclaration, corrobore les affirmations de Brunet. Il affirme n’avoir point tenté d’appréhender Brunet puisqu’il était « un homme brave et renommé par sa force, […] et ne voulus point forcer [ses] compagnons à engager un combat avec lui ». Il confirme aussi avoir été rapidement capturé alors qu’il courait sur la glace à la hauteur du Grand-Moulin durant l’affrontement. Brunet lui aurait alors lié les mains avec de la corde afin de le constituer prisonnier.

Thomas Brunet est aussi considéré comme étant un loyaux par Jean-Baptiste Paquin, son capitaine de milice de l’époque, dans une liste datée du 11 septembre 1839. On retrouve enfin le nom de Brunet sur une pétition des habitants de Saint-Eustache afin d’empêcher le départ du curé Hippolyte Moreau le 23 novembre 1852.

Thomas Brunet meurt à Saint-Eustache le 7 septembre 1892 à l’âge de 87 ans. Devant les cultivateurs Calixte Saint-Maurice et Polydore Goyer dit Bélisle qui agissent comme témoins, Brunet est inhumé à cet endroit trois jours plus tard.

Elmire Richard, l’épouse de Brunet au moment des troubles, réalise aussi une déposition auprès du juge de paix et co-seigneur Charles-Louis Lambert-Dumont le 14 janvier 1838. Dans son témoignage, elle affirme la veille (13 janvier) être allée chez un nommé François (alias Fanfan) Nadon chez qui elle discuta longuement de politique en compagnie de deux frères de la paroisse de Saint-Laurent (Montréal), Jean-Baptiste et Étienne Wallet (Ouellet?). Les deux homme véhiculent vraisemblablement de fausses rumeurs à l’égard d’une (trop!) grande mobilisation patriote derrière Papineau, à savoir 10 000 personnes! L’échange verbal fut alors vigoureux entre ces deux patriotes et cette dame qu’ils considèrent « pour la Couronne ».

Références :

Archives de l’évêché de Saint-Jérôme, Pétition des paroissiens de Saint-Eustache pour empêcher le départ du curé Hyppolite Moreau, 23 novembre 1852.

BAC, Feddocs, Lower Canada Rebellion looses claims 1837-1855, Project #19-2, RG 19, series E-5-B (R200-113-0-F), volume 5482, no 190.

BAC, recensement de 1831, County of the Lake of Two-Mountains, St.Eustache Parish, bobine C-723.

BAC, recensement de 1842, County of the Lake of Two-Mountains, St.Eustache Parish, bobine C-728.

BAnQ, « Documents relatifs aux événements de 1837-1838 », Fonds Ministère de la justice, M-165-2, no 1053, déposition d’Elmire Richard, épouse de Thomas Brunet, 14 janvier 1838.

GLOBENSKY, Charles-Auguste-Maximilien, La Rébellion de 1837 à Saint-Eustache, Montréal, Éditions du Jour, 1974, présenté par Hubert Aquin, édition originale parue en 1883, 466 p.

PAQUIN, Jacques, « Tableau politique », La Revue des Deux-Montagnes, no 5, octobre 1996, p. 43-65.

Répertoire des Actes de baptêmes, mariages et sépultures (R.A.B.), P.R.D.H.

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